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  • Photo du rédacteurBenoit Poisson

Curiosité

Ce texte est destiné à un public averti...


Ça sentait un peu le graillon dans tout l’appartement, une mauvaise ventilation couplée à une cuisine un peu trop riche en huile. Il rotait à intervalles réguliers les pommes de terre sautées du midi et sa barbe naissante le grattait jusqu’à s’en faire saigner la peau. Ses ongles trop longs venaient frotter ses joues. Il aimait ça, ça le soulageait et il léchait les petites traces de sang étalées sur ses doigts. Silencieux, assis dans le salon il patientait, son heure viendrait. La mousse du fauteuil avait du mal à résister sous le poids de l’homme. Le joint sec du robinet laissait passer des gouttes qui se fracassaient dans l’évier en inox. Le bruit rythmait ses heures d’attente, rien d’autre à faire. Plic... plic... plic… Un supplice pour beaucoup mais lui s’en moquait, ça lui permettait de se situer dans son époque de tarés, entendre ce bruit c’était être vivant, attendre c’était être vivant, avoir encore conscience de ses mouvements de respiration. Plic… plic… plic… un mince rayon de soleil filtrait par les rideaux tirés, laissant apparaître la poussière qui voltigeait. Plus l’heure avançait et plus l’homme s’éveillait, il savait que dans peu de temps il vivrait pour de bon, qu’enfin il suivrait ses instincts et s’envoleraient ses frustrations accumulées depuis des années. Plic… plic… plic… Il avait chaud, en slip dans son fauteuil il auscultait son corps. Trop gros, trop poilu, il passait ses mains sur son ventre et pinçait la graisse. Il n’avait pas assez de ses deux mains pour tout empoigner. Il remuait ses cuisses et observait sans aucune émotion les vaguelettes provoquées par le mouvement. Plic… plic… plic… il allait même jusqu’à mettre sa main dans son slip, là où l’excitation grandissait pour s’assurer qu’il éprouvait des émotions. Son heure viendrait… Bientôt. Il fermait les yeux, faisait mentalement le chemin qu’il allait prendre, se comporter comme toujours, être discret, lambda, raser les murs et en approchant de l’endroit, relever la tête et choisir. Plic… plic… plic…


Il souriait, il était temps de se mettre en route, enfiler un vieux t-shirt taché, retirer son slip et mettre un jogging ample pour que personne ne remarque son excitation qu’il avait du mal à contenir. Dehors le soleil du début d’été écrasait tout. En un quart de seconde il s’était mis à suer à grosses gouttes. Pas âme qui vive dans les rues étroites de la petite ville. Encore quelques pas et il serait là, pile à l’heure, il n’en pouvait plus et plaçait sa main devant son entre-jambe pour se cacher encore un peu. La volière était ouverte et tout le monde partait dans tous les sens. Très peu d’adultes et beaucoup d’enfants, c’était parfait. Sans même s’en rendre compte sa main caressait de plus en plus vite le tissu crasseux qui le recouvrait encore. Ses joues le grattaient, il s’en moquait à présent, trop concentré sur ce qu’il était venu faire. Tout le monde s’éparpillait, la majorité en groupe bruyant, lui traquait l’âme solitaire, le petit voyageur esseulé. Il l’avait vu, c’était lui, il ne pouvait plus attendre. Il l’avait rapidement dépassé en le frôlant, il allait éclater, tout lâcher, ce tout petit contact le rendait fou. En se retournant et sans même regarder le visage de sa victime il avait sorti sa bite aussi petite que lui était gras pour exploser en pleine rue, tout sortir en souriant. Soulager toute sa perversité d’homme dégueulasse sur les habits du petit garçon. Il se collait à lui et lui murmurait d’une voix immonde et satisfaite : la curiosité c’est un élan vers l’autre. Il s’enfuyait, laissant le petit garçon en pleurs et victime de l’immonde société de détraqués.

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