Déclaration
- Benoit Poisson
- 23 nov. 2020
- 3 min de lecture
C’est étrange de parler sans maitriser le sujet, sans même réellement te connaitre. Pourtant tu es là, puissante et rayonnante, si forte dans tes certitudes, tes doutes et dans tout ce qui fait toi. Dans mon imagination tu es forcément belle, rieuse et charmante quand tu fredonnes un air léger de liberté. Tu es forcément belle quand tu hurles, te débats et combats l’injustice, cette injustice d’être toi parmi nous. Pourtant tu ne l’as pas choisi, tu n’as rien décidé, le simple fait du hasard. On dit souvent qu’il te faudra te battre deux fois plus, chaque jour et toute ta vie, prouver que tu n’es pas qu’un corps avec ses formes, ses courbes et sa chaleur dont on pourrait disposer à notre guise, l’envie de ceux qui bavent comme des chiens enragés et qui sous prétexte d’un physique plus dur, plus musculeux te couvriraient de honte sous leurs envies supposées supérieures. Pourtant je n’ai jamais vu autant de fierté dans les yeux d’un homme, autant de conviction à profiter de qui tu es. On dit que les temps changent, que tout le monde s’ouvre aux autres, sur nos différences et qu’enfin on accepte une égalité, tout ça c’est presque palpable, presque… Moi, je vois qu’il y a encore un long chemin. Tant que tu ne pourras porter ta petite robe à fleurs courte et légère pour aller étudier, tant que tu ne pourras pas marcher le soir, seule, avec juste ton envie de profiter de l’humeur du temps, tant que l’on continuera à penser que, justement, tu ne peux pas le faire aussi bien nous, tant que tes compétences ne seront pas rémunérées à leur juste valeur, il restera un long, très long chemin à parcourir. Mais dans ton combat pour ta reconnaissance légitime, ne m’oublie pas, ne m’exclus pas. Il ne faudrait pas que nous prenions des routes opposées mais simplement que nous marchions ensemble, main dans la main, avec ton accord, corps contre corps sans autre envie que de te voir libre et épanouie. Non, nous ne sommes pas tous hideux dans nos âmes et nos intentions ne sont pas malsaines. La grande majorité d’entre nous souhaite te voir heureuse et fière d’être ensemble, avec nous, pour toujours. Ne nous juge pas trop sévèrement, par pitié laisse nous une chance de jouer au jeu de la séduction. C’est pourtant beau la séduction, c’est la vie et le cœur qui bat pour te plaire, pour nous plaire. Un simple non pour renoncer à charmer, un simple geste pour accepter ton choix et promis je n’insisterais pas. Mais toi, continue à avancer, aussi vite que ton envie de te voir exister pour ce que tu es et non pour ce que tu représentes. Ne t’interdis rien, jamais et par ta présence invoque la force nécessaire pour te tenir debout, toujours. Tu vois, je te donne encore des ordres ! Pardonne-moi, ce n’est pas évident ni instinctif ces choses-là. Tellement tout encore nous fait croire qu’on a le droit à disposer de toi, sans même ta permission… Tu es mince, je suis gros, tu es grande, je suis petit, tu es belle, je ne suis pas bien beau, en fait nous sommes tous différents mais acceptons d’avancer ensemble côte à côte. J’admire ton courage à vouloir être tout ce que la vieille société patriarcale s’est essoufflée à réduire au silence. Le buste droit, continue à vivre comme bon te semble et promis, je ne serai pas loin si jamais tu as décidé de me sourire.

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