Notre bulle
- Benoit Poisson
- 9 oct. 2019
- 2 min de lecture

On connait tous ce sentiment rassurant, comme un cocon inviolable. Une madeleine de Proust, notre recherche du temps perdu. Vous savez, celui du « c’était mieux avant » parce que plus jeune, plus vif, plus désireux et peut être même plus désirable. On est là, bien au chaud, assis dans un fauteuil confortable. Dehors, ça peut bien péter dans tous les sens, on est juste assis au calme comme dans une bulle protectrice. On l’a construit avec des visages, des films, des livres, des rencontres, des notes de musique, de l’amour, de la rage. Pour fortifier tout ça, sont venus se greffer des tonnes d’inconscient, des milliers d’images, de sons, des accords de guitare, des voix par centaines. Des souvenirs que l’on n’a pas vraiment choisis mais qui nous accompagnent. Des indissociables de nous-même qui ont façonné cette bulle qui nous fait, à cet instant, nous sentir bien et apaisé. On n’y prête pas attention, les fondations sont là et semble-t-il pour l’éternité. On se déplace au quotidien avec notre bulle en traînant tout ce qui la fait grandir. On ramasse çà et là de nouveaux objets, de nouvelles têtes, de nouveaux rires, de nouveaux pleurs et notre bulle grandi. Parfois à l’occasion d’une pause, on creuse et on cherche la petite partie qui nous fait sourire et nous réconforte dans ce que nous sommes devenus. Il reste toutes ces parties auxquelles on ne touche jamais parce que sans importance, elles ne nous font éprouver aucun sentiment particulier. Trop éloignées de nous, on y prête rarement attention. Elles sont là parce qu’un jour on les a ramassées par hasard et elles se sont placées quelque part dans nos vies. Et puis un matin on s’aperçoit qu’il manque un petit quelque chose. Notre bulle n’est plus tout à fait la même. Un manque imperceptible mais qui fait fissurer notre bulle, notre vie. Finalement on se dit que toutes ces choses sans importance auxquelles on ne prête même plus attention sont le fondement de ce que nous sommes vraiment. A perdre sans le vouloir ce qu’on avait accumulé sans le savoir on finit par affaiblir notre bulle. Jusqu’à ce qu’elle éclate.
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